Décidemment ça se CONfirme

Publié le par Robert Willard

(L'actualité est allée plus vite que nous : cette chronique était destinée à être publiée hier - avant, donc, l'éviction officielle de notre ministre des Affaires Etrangères.)

 

Nous venons d'entendre la question la plus con du monde, cher lecteur. Ce n'est pas rien.

 

Elle nous a cueilli alors que nous débarassions les tables des petit-déjeuners. La radio (France Info) diffusait une interview de MAM par une journaliste qui l'interrogeait sur la "gestion de la révolte tunisienne" par la diplomatie française et le développement de la crise lybienne.

 

Leur petite joute verbale suivait son cours ultra-convenu ("mais ne pensez-vous pas", "vous imaginez bien"...), quand soudain la journaliste décida de prendre de l'altitude : évoquant les relations des démocraties en général avec les régimes autoritaires, elle posa LA question :

 

"Peut-être a-t-on [les démocraties, donc] trop dialogué avec les dirigeants [des régimes autoritaires], et pas assez avec les peuples ?"

 

Nous en avons eu le souffle coupé.

 

Cette journaliste semblait avoir lu notre chronique "naissance d 'une conocratie" et s'être attachée à la résumer en une seule question - cette question : véritable chef-d'oeuvre de racourci, prodige de synthèse dont on ne conçoit déjà plus qu'il soit absent des manuels de français et de philosophie à venir, tant il est admirable par son économie, époustouflant par sa densité et confondant par sa justesse.

 

Nous ne savons même pas comment en aborder l'analyse. Elle est si parfaitement con, si hérissée de connerie sous tous ses angles, qu'elle en paraît inexpugnable.

 

Con à ce point, ce n'est plus une question : c'est une citadelle.

 

Mais aucune forteresse n'est imprenable, cher lecteur. Par l'assaut, par les mines, le siège ou la trahison, toutes sont tombées. Alors, hardi ! Nous n'avons pas trop le temps de finasser,  prenez cette échelle avec nous et courons jusqu'aux remparts !

 

Que nous disait cette journaliste ?

 

Elle suggérait que "on", entendons "les dirigeants des démocraties", auraient dû "dialoguer" avec les peuples des pays autoritairement gouvernés, par dessus la tête de leurs dirigeants.

 

Donc, concrètement : avec les représentants des partis d'opposition ? Mais comment savoir ce qu'ils représentent vraiment ? Et s'il n'y en a pas ? Cela doit-il se faire au risque (très probable) de ruptures des relations diplomatiques ?

 

Peut-être faudrait-il n'avoir de relations diplomatiques qu'avec des démocraties ? Auquel cas, comment dialoguerait-on avec les peuples des pays à régime autoritaire ?

 

Et que dire des pays qui se donnent, démocratiquement, des régimes autoritaires (c.f. l'arrivée au pouvoir de Hitler en 1933) ?

 

Nous vous avons dit redouter l'avènement d'un régime recourant au référendum permanent pour ses prises de décisions, et faisant de l'ingérance un devoir civique et national : notre journaliste nous propose, elle, à mots à peine couverts, l'ingérance internationale par voie de référendum. Le nec plus ultra.

 

Ne reconnaître la légitimité du gouvernement d'un pays, quelle que soit sa nature, que validée par référendum (ou "dialogue") auprès du peuple dudit pays.

 

Vision de rêve, en vérité !

 

Le plus inquiétant dans cette interview, n'est même pas la terrifiante stupidité de la question de la journaliste : c'est le naturel avec lequel MAM l'a accueillie - et y a répondu. Et peu importe la réponse. A aucun moment elle n'a relevé, ne serait-ce que le plus discrètement et courtoisement du monde, l'énormité proférée - parce que dans l'univers où elle vit, ce n'est déjà plus une énormité.

 

Bob Willard

26/02/2011

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Publié dans société

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