Le pur désintéressement n'est pas de ce monde

Publié le par Robert Willard

Il y a une excellente raison de se méfier des théories scientifiques en vogue, cher lecteur : les scientifiques ont besoin d'argent pour travailler - s'équiper en matériel dernier cri, recruter des collaborateurs nombreux et qualifiés, monter des expéditions lointaines, coûteuses et interminables, etc. Pour avoir de l'argent, c'est à dire des budgets, ils leur faut rallier à leur cause leurs vrais patrons, ceux qui signent les chèques. C'est pourquoi les théories dont nous entendons parler ne sont pas forcemment les mieux corrélées à la réalité des choses : ce sont juste celles qui ont eu la préférence des signeurs de chèques.

 

Mais les signeurs de chèques ne sont-ils pas, in fine, des politiques (ou des directeurs financiers, ce qui revient au même) totalement ignorants en matière scientifique ?

 

Si.

 

Comment donc peuvent-ils trancher entre deux axes de recherche nécessitant même financement ? Certainement pas sur des critères scientifiques auxquels ils ne comprennent rien.

 

En fait, ils vont se baser sur à peu près n'importe quel critère, SAUF scientifique. Cela ira du critère économique (Roger demande vingt millions, Gérard seulement quinze : va pour Gérard) au personnel (bon, c'est vrai que Roger demande plus, mais c'est mon pote) en passant par le politique (et puis les recherches de Roger soutiennent mieux le programme "écolo" pour les élections à venir) - sans préjudice d'autres détours plus ou moins avouables.

 

Les directeurs de laboratoires  et autres départements de recherche scientifiques ont bien compris cela. Coincés entre ambitions et nécessité, ils n'ont finalement guère d'autre choix que de politiser leur démarche pour obtenir des crédits. Des intrigues se nouent. Des luttes sournoises opposent les tenants de théories rivales - c'est à qui saura le mieux "vendre" ses recherches, par une lèche habile, un bagout embobineur, voire un zest de corruption. Celui qui saura capter l'oreille d'un média influent aura une très belle longueur d'avance, quelle que soit la qualité objective de ses travaux.

 

La théorie en vogue n'est pas la meilleure : c'est juste celle de ceux qui tiennent le micro.

 

Voilà pourquoi on n'entend plus parler du "trou" dans la couche d'ozone. Ce péril mortel a-t-il disparu ? A-t-il jamais existé ? On ne sait pas. La seule chose sûre, c'est que ceux qui croient à son existence, et au danger qu'il représente, n'ont plus le micro.

 

Voilà pourquoi toute théorie nouvelle et révolutionnaire peine à se fair entendre : ceux qui tiennent le micro, par définition, défendent les théories établies - les leurs, celles qui leur garantissent de gros budgets.

 

Voilà pourquoi on n'entend JAMAIS parler simultanément, sur un même sujet, de deux théories divergentes : parce que ceux qui tiennent le micro ne le partagent pas.

 

Et voilà pourquoi nous pouvons "apprendre" demain que la Terre ne se réchauffe pas, que l'effet de serre n'existe pas (c'est une erreur de calcul), que le big bang n'a jamais eu lieu : tout simplement, le micro aura changé de main.

 

On trouvera une superbe illustration de cette triste réalité dans l'histoire de la théorie de la Relativité, qui fut l'occasion d'une véritable guerre des écoles de pensée (et qui vit, accessoirement, Poincarré se faire dépouiller de sa légitime paternité).

 

Il est certain que nombre de découvertes ont été délibéremment enfouies, des recherches sabotées, des chercheurs calomniés, en vertu de ce principe que le politique prime touours sur le scientifique. Et il est tout aussi certain que l'emmergence de nouvelles théorie tient beaucoup plus à des renversement de rapports de force politiques, qu'à toute autre considération.

 

Ayez toujours ceci à l'esprit, cher lecteur, lorsque vous compulserez votre revue de vulgarisation scientifique favorite. Le vrai, le pur désintéressement, n'est pas de ce monde. En tout cas, il n'a pas droit aux projecteurs, ni au micro.

 

Bob Willard

12/10/2010

Publié dans société

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C
• Description : Mon Blog, présente le développement mathématique de la conscience c'est-à-dire la présentation de la théorie du Fermaton. La liste des questions mathématiques les plus importantes<br /> pour le siècle à venir, le No-18 sur la liste de Smale est; Quelles sont les limites de l'intelligence tant qu'humaine et artificielle.
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